dimanche 15 mai 2022

MMCDXXIX : Une très belle facade du XVIIIe siècle au 4/6 rue Gaillon, l'Hôtel Douet de Vichy (ou Sulkowski).

 

Au 4/6 rue Gaillon (dans le 2e arrondissement), juste à l'Est de l'Avenue de l'Opéra, on peut admirer une superbe façade du XVIIIe siècle.

La partie centrale est particulièrement intéressante :

On peut voir dans la partie supérieure un fronton en demi-lune avec un décor rocaille :

Avec un 1er mascaron entre 2e et le 3e étage :

Puis entre le 1er et le 2e étage, on peut voir un décor d'armoiries que l'on retrouve sur de nombreux édifices des XVIIe et XVIIIe siècles :

La partie la plus belle est le porche situé au dessus du portail :

On peut y observer un 2e mascaron :

et les consoles situées de part et d'autre sont aussi superbes :

Les ferronneries sont aussi très belles, tant les garde corps ...

que les grilles qui protègent le rez-de-chaussée :

Enfin sur la porte on peut voir aussi un très bel heurtoir :


Cet immeuble est inscrit à l'inventaire des immeubles qui font l’objet d'une protection patrimoniale dans le cadre du PLU du 2e arrondissement.

"Ancien hôtel du prince Sulkowski construit vers 1740 oeuvre de l'architecte Jacques-Richard Cochois (Maison Douet répertoriée par Michel Gallet). Façade en pierre de taille percée régulièrement de hautes fenêtres et ornementée de mascarons, de pilastres et de consoles ouvragées. Le style rocaille se lit aussi bien sur les fenêtres, les ferronneries que sur les vantaux du portail d'entrée. Le motif des appuis en fer forgé se retrouve sur les autres oeuvres de Cochois. Les mascarons sont omniprésents dans le vestibule et dans la voûte de l'escalier. La rampe constitue un chef-d'oeuvre de ferronnerie Louis XV. L'hôtel a subi des modifications et une extension de deux travées ainsi qu'une surélévation en 1881-1882 par l'architecte Tronquois. Construction remaniée, demeurant un témoignage exceptionnel de la typologie de l'hôtel particulier du XVIIIe siècle."

On y apprend donc  que cet hôtel date des années 1740. Je suis allé vérifié sur le plan Turgot des années 1730. On se rend compte qu'en effet, il n'apparaissait pas encore sur ce plan :

En ce qui concerne architecte indiqué, Jaques-Richard Cochois, une communication de Michel Gallet donnée en 2005 et paru dans le bulletin des antiquaires permet d'apprendre qu'il est mort en 1761 et qu'il a réalisé d'autres façades dans le Centre de Paris (voir lien suivant)

 Parmi les façades mentionnées celle de l'angle des rues Saint-Denis et Grenéta à laquelle j'avais consacré un article paru le 12 mars 2019.

Cet hôtel a été construit pour la famille Douet. Il s'agit d'une famille de magistrats et de financiers qui venaient du Bourbonnais. J'ai retrouvé un arrêt du conseil d’État qui en 1749 interdisait le prélèvement de droits de péage dans la ville de Vichy :

Un procès eu lieu en avril 1789 entre les héritiers de cette famille. Il permet d'apprendre que Gabriel Douet possédait la terre de Charmeil au Sud de Vichy. Ses deux héritiers étaient Louis son fils aîné et Charles-Gabriel le frère cadet de celui-ci. Gabriel Douet décédé en 1730 et son fils aîné obtint une grande partie de son héritage mais à sa mort c'est son frère cadet Charles-Gabriel qui lui succéda. Il mourut lui-même en janvier 1787. Il a laissé une trace de son existence avec une plaque qui se trouve dans l'église de Charmeil (03) [voir lien suivant] On lit sur cette plaque qu'il était Conseiller à la Grande Chambre du Parlement de Paris.

Charles-Gabriel Douet de Vichy était un collectionneur de livres : on retrouve son ex-libris dans plusieurs ouvrages :

L'Hôtel est ensuite passé aux mains du prince Sulkowski, Józef Sulkowski   Il s'agit en effet d'un officier polonais né en 1773, qui participa en 1792 à la guerre contre la Russie puis arriva en France en 1793. Il a été envoyé comme agent secret dans l'Empire ottoman puis a servi sous les ordres du général Bonaparte. Il était présent à ses côtés aux bataille du Pont d'Arcole et il est mort au Caire pendant la campagne d’Égypte en Octobre 1798.

La description du PLU laisse entendre que cet édifice possède un très bel escalier. On peut s'en rendre compte en regardant le plan cadastre du début du XIXe siècle :


L'escalier qui apparaît dans le prolongement du hall situé à droite du hall a(vait ?) l'air superbe :


La façade a été préservée mais l'immeuble a connu de profondes transformations comme on peut s'en rendre compte avec une vue aérienne :

Il apparaît en sailli d'un vaste immeuble dont la façade est en retrait. Une partie importante de cette transformation -d'après le PLU- date de 1881/1882 et est due à l'architecte Auguste Tronquois (1829-1884). On lui devait aussi la façade du magasin "Au gagne Petit" qui se trouve tout près de là du côté impair de l'avenue de l'Opéra (voir mon article du 4 juin 2021). On lui doit aussi la façade d'un immeuble du 11 rue d'Uzès dans le 2e arrondissement.

Le permis de construire a été déposé le 14 janvier 1882 (alors que les travaux avaient commencé). Il est intéressant de noter le nom du propriétaire de l'époque : il s'agit de "Claudon domicilié 4 boulevard de Capucines".... ce qui m'a conduit à un autre personnage intéressant : Lucien-Joseph Claudon. Celui-ci avait fondé en 1875 le café Capucines au 4 boulevard de Capucines. J'ai retrouvé un document de 1884 qui évoque un changement de statut du café en son nom et celui de sa femme MarieThérèse Choteau. Ils étaient domiciliés : 6 rue Gaillon (même si dans la retranscription l'orthographe Galion est erronée) :



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