Le musée Carnavalet est trop peu connu des
Parisiens. J'ai décidé de consacrer cet article à un tableau que l'on peut y voir de Pierre-Antoine Demachy
(1723-1807) dont le titre est "vue du quai de Gesvres, depuis le Pont-au-Change, au moment de la démolition de ses maisons" (1788). Ce tableau est entré dans les collection de la Ville de Paris en 2005.
Pour se repérer, voici sur le plan Turgot des années 1730, le point de vue d'où c'est placé le peintre :
et pour détailler attentivement ce tableau, j'ai placé des numéros afin de pouvoir se repérer :
Le n°1 désigne les maisons de l'île de la Cité situées entre le
Pont-au-Change et le Pont Notre-Dame. Elles sont peu visibles sur la
photographie en raison du reflet mais elles montrent combien la densité
urbaine était forte en plein cœur de Paris.
Le n°1 désigne les maisons de l'île de la Cité situées entre le
Pont-au-Change et le Pont Notre-Dame. Elles sont peu visibles sur la
photographie en raison du reflet mais elles montrent combien la densité
urbaine était forte en plein cœur de Paris. Tout cet espace urbain a
été modifié sous Napoléon III, à l'époque du préfet Haussmann, qui a
ordonné à cet endroit la construction du tribunal de commerce.
Le n°2 désigne le Pont-au-Change au moment de la destruction des maisons (qui avait été ordonnée en 1786).
J'ai consacré à un
article paru le 3 octobre 2012 à deux tableaux d'Hubert Robert qui montrent la démolition des maisons de ce pont.
On reconnaît la silhouette de l'actuelle "tour Saint-Jacques" puisque le
reste de l'église a été détruit une dizaine d'années plus tard sous le
Directoire.
Le n°4 désigne ce qui a le plus retenu mon attention dans ce tableau de P.-A. Demachy : l'aspect du quai de Gesvres :
Les voûtes que l'on peut voir en bord de Seine sur la rive droite ont
été construites en 1642 par la volonté du marquis de Gesvres. Je renvoie
à l'article que j'avais publié le 25 juillet 2009
à propos de la station Châtelet. J'y expliquai comment une de ces
galeries avait été redécouverte lors de la construction de la ligne 7
dans les années 1920.
Le n°5 désigne la partie Nord du pont Notre-Dame. On y voit une construction :
Il s'agit d'une des pompes dont le but était de prélever l'eau de la
Seine pour la consommation des Parisiens. La "tour" servait de château
d'eau pour permettre une pression suffisante afin d'alimenter les
fontaines de la ville. Paris connaissait encore au XVIIIe siècle de
grands problèmes d'adduction d'eau et donc les habitants devaient se
contenter d'une eau de piètre qualité (d'où la consommation massive de
vins et de bières). Cette pompe était mentionné sur le plan Turgot :
Le n°6 désigne le Pont Notre-Dame lui même :
On voit que sur ce pont, les maisons avaient déjà été détruites. Hubert
Robert a aussi peint les travaux de la "déconstruction" qui avait eu
lieu quelques années plus tôt. Ce pont a été complètement reconstruit
sous Napoléon III puis considérablement modifié en 1912 (voir mon
article du 19 mai 2009).
En regardant ce détail du tableau, on comprend pourquoi la circulation
sur la Seine était périlleuse dans Paris tant il était compliqué de
passer sous les ponts.
Le n°7 désigne à l'arrière-plan à droite deux édifices à l'horizon :
A gauche, on voit une tour avec un drapeau. Il s'agit du
beffroi de l'Hôtel de Ville qui est au même emplacement aujourd'hui même s'il a été reconstruit au XIXe siècle. Juste derrière on aperçoit une volume
rectangulaire. Il s'agit de l'église Saint-Jean-en-Grève. La destruction
de cette église a elle aussi été ordonnée en 1797 sous le Directoire.
A droite, on peut voir une autre autre église. On reconnaît sans
difficulté la façade classique et la tour de l'église
Saint-Gervais-Saint-Protais qui, elle, a échappé à la démolition. La tour est masquée par des échafaudages sur la photo ci-dessous tout à droite.