MMDLXXXV : Sur les traces de l'Hôtel de Noirat, son fronton... et son cadran solaire.

 A l'angle de la rue des Barres et de la rue de l'Hôtel de Ville à la hauteur du n°80 (Paris 4e), on peut voir le long d'un mur un fronton. Je lui ai consacré un article en novembre 2008, il s'agit d'un vestige de l'Hôtel de Noirat. Je reviens sur l'histoire de ce fronton pour préciser -près de 15 ans plus tard- sa localisation initiale précise.

En effet, j'ai découvert il y a peu de temps cette photographie prise par Atget sur laquelle on voit ce fronton :

J'ai cherché à comprendre où cette photographie avait été prise.

L'Hôtel de Noirat apparaît sur le plan Turgot des années 1730 : 

On pourrait croire que l'entrée que l'on voit sur la photographie d'Atget est le portail qui donnait sur la rue le long de laquelle l'Hôtel était situé : la rue Vieille du Temple. Or, ce n'est pas du tout le cas.

On peut obtenir un certain nombre d'informations sur cet hôtel grâce à un article écrit par Jean-Pierre Babelon en 1970 dans le Bulletin de la Société de l'Histoire de la Ville de Paris et d'Île-de-France, pages 36-137 :

On apprend ainsi par cet article : 

1°) Que la façade de cet hôtel datait du règne de Louis XIV.

2°) Qu'il porte le nom du baron de Noirat qui était un membre de la famille de Laubespine.

3°) Que l'Hôtel avait été amputé d'une de ses ailes dans les années 1810 lors du percement de la rue du Marché-des-Blancs-Manteaux.

En ce qui concerne les Laubespine, il s'agit d'une puissance famille. Madeleine de L'Aubespine, veuve de René du Val, sieur de Tors, elle était la tante du baron de Noirat :

Le père du baron de Noirat, qui s'appelait Claude comme son fils était "Greffiers des ordres du roi et président de la Cour des Comptes". Il avait épousé le 18 août 1584 en l'église Saint-André-des-Arts a première épouse Marie Malon. Il s'est remarié en 1602 avec Louise Pot la mère du baron de Noirat qui nous intéresse et dont nous ne connaissons pas la date de naissance. Quant à son fils, il apparaît comme "maître de camp d'un régiment de pied". Le mystère plane donc sur le baron de Noirat qui a peut-être hérité de l'Hôtel auquel il a donné son nom grâce à sa tante.

L'article de Jean-Pierre Babelon était illustré par une carte passionnante :

Cette carte montre le pâté de maisons situé à l'Est de la rue Vieille du Temple entre la rue des Francs Bourgeois et la rue des Rosiers. On y voit la localisation très possible de l'enceinte de Philippe Auguste. Or l'Hôte de Noirat était situé juste au Nord de ce tracé :

On peut aussi observer le plan castral du début du XIXe siècle à l'époque où l''Hôtel était encore intégralement conservé :

En voici ici un agrandissement :

On voit que la façade donnant sur la rue Vielle du Temple était particulièrement exiguë.

Lors du percement de la rue du Marché des Blancs-Manteaux dans les années 1810, toute la partie sud de l'Hôtel de Noirat a été démolie :

Ainsi la photographie prise par Atget montre-t-elle cette cour visible depuis la rue du Marché des Blancs Manteaux :

L'Hôtel de Noirat été démoli à la fin des années 1930 pour être remplacé par un immeuble Art Déco en briques dans lequel on trouve des logements sociaux. Voici la vue depuis la partie Est de la rue des Blancs Manteaux à l'angle avec la rue des Hospitalières Saint-Gervais. J'ai représenté l'emplacement du portail avec une étoile :

Et voici ce même immeuble cette fois sous un autre angle depuis la rue Vieille-du-Temple avec à nouveau le portail représenté par une étoile :

Il ne reste rien de l'hôtel de Noirat à part donc ce fronton décoré :

On conserve aussi le cadran solaire qui ornait cette façade mais il est devenu très difficile de le voir :

Pour se convaincre de son existence, je publie cette photographie que j'ai récupéré sur Wikipédia à l'article consacré à l'Hôtel de Noirat :

Cette vigne vierge qui pousse à cet endroit est superbe mais il est dommage qu'on l'est laissée pousser de façon anarchique alors qu'avec un peu de souci pour le Patrimoine il ne paraissait pas impossible de l'élaguer pour qu'on continue à voir ce cadran solaire.