mardi 30 septembre 2025

MMDCCCXXXVII : Une peinture qui permet de voir un édifice oublié : le pavillon de la duchesse de Maine à l'Arsenal


 Au musée des Beaux-Arts de Tours, mon attention a été retenue par ce tableau de Jean-Pierre-Louis-Laurent Houël (1735-1813) car il a pour titre Vue de la Seine devant les jardins de l'Arsenal à Paris. Il a été peint en 1769.

En reprenant un plan Turgot des années 1730, j'ai retrouve un élément du tableau qui permet de bien le situer dans le Paris du XVIIIe siècle. Un endroit appelé sur le plan "La pointe de l'Arsenal" :


On retrouve le bâtiment qui apparaît sur le plan dans le tableau et il est représenté de manière très semblable :

Le catalogue raisonné des peintures du XVIIIe siècle du musée des Beaux-Arts de Tours rédigé par Sophie-Joint Lambert et paru en 2008 nous apprend que cette construction avait été édifiée en 1729 pour la duchesse du Maine par l'architecte Boffrand.

Ce pavillon a été représenté, en 1741, par Charles Germain de Saint-Aubin :

La duchesse du Maine était une femme très puissante au XVIIIe siècle : Louise-Bénédicte de Bourbon, née le 8 novembre 1676 et décédée le 23 janvier 1753 était la fille d'Henri-Jules de Bourbon-Condé donc membre d'une branche cadette de la dynastie des Bourbons. Elle était surtout l'épouse du duc de Maine, Louis-Auguste de Bourbon (1670-1736), fils bâtard légitimé du roi Louis XIV. En 1719, lors de la conspiration de Cellamare, il complota contre son cousin le régent Philippe d'Orléans ce qui lui valu d'être emprisonné tout comme son épouse (qui l'avait fortement incité à s'impliquer dans cette intrigue). 

L'Arsenal était une des résidences du duc de Maine car il avait été nommé en septembre 1694 Grand maître de l'Artillerie. Le pavillon de la duchesse de Maine n'était qu'un petit édifice par rapport au reste des bâtiments :

 Dans un article écrit en 1970 dans Bulletin Monmental, Jean-Pierre Babelon a publié des plans du pavillon de la duchesse de Maine. Il était composé par un vaste salon donnant face à la Seine :

La façade à pans coupés de ce salon faisait face à la Seine avec une terrasse en bord du fleuve.


 La partie que l'on peut voir sur la peinture de Houël exposée au musée des Beaux-Arts de Tours est la façade Est qui devait avoir une très belle vue puisqu'elle donnait vers Paris.

 

En 1769, ce pavillon de la duchesse de Maine, passé aux mains du duc de Choiseul fut transformé en maison de bain. Situé en amont de la Seine, par rapport à Paris, il permettait d'y profiter d'une eau plus pure qu'en aval. Cela explique que l'oeuvre ait fat partie des collections du château de Chanteloup (où Choiseul avait dû d'exiler après sa disgrace) qui ont fait l’objet d'une saisie révolutionnaire en 1794.

 Au 1er plan du tableau, on peut voir le bord de Seine :

Il s'agit du bras de Seine vue depuis la pointe de l'île Louvier (ou des Louviers) [rattachée à la rive droite en 1843] ou depuis l'estacade qui reliait cette île à la rive droite :

Une partie du paysage semble relever de l'imagination de l'artiste. Par exemple sur la gauche, on voit un clocher avec une flèche :


A cet endroit, on devrait trouver l'hôpital de la Salpétrière comme on le voit sur plan Turgot :

Ce n'est pas une flèche que l'on devrait voir mais une coupole :

Autre élément qui semble relever de l'imagination : la sinuosité du bord de Seine sur la rive droite en amont du pavillon de la Duchesse de Maine :


Aucun plan d'époque ne montre une telle irrégularité de la Seine comme par exemple sur le plan Jaillot révisé en 1770 (un an après l'année où Houël a peint ce tableau) :
Le tableau de Houël est donc très intéressant pour ce qui concerne l'aspect du Pavillon de la duchesse de Maine mais me semble un peu plus approximatif concernant le reste du paysage et relève des qualités créatives de l'artiste.

 

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