mardi 28 octobre 2025

MMDCCCXLIII : Le 26, rue des Francs Bourgeois (1er épisode) : la résidence d'une grande dame du Marais.

 

Au 26, rue des Francs-Bourgeois (Paris 3e), on trouve une très belle façade à laquelle, je ne m'étais jamais intéressé. Cependant, en passant devant, j'ai vu la porte ouverte ce qui m'a donné envie d'aller y glisser un oeil.

A ma grande surprise, alors que la façade est typique de la 2e moitié du XVIIIe siècle, j'ai découvert à l'intérieur une cour avec des bâtiments plus anciens.


J'ai été amusé de découvrir un mur aveugle marquant la limite avec la parcelle située, juste à côté sur la droite :

En sortant, j'ai lu le panneau informatif situé juste devant la façade. 

On y lit "Hôtel de Sandreville. Sous cette appellation, il convient de distinguer deux hôtels d'époques fort différentes. Le premier a été bâti, vers 1586, en fond de cour pour Claude Mortier, sieur de Soisy, notaire et secrétaire du roi. La façade sur jardin, restaurée, est la plus belle, et donne un bon exemple de l'architecture privée à Paris à la fin du XVIe siècle. Le nom de Sandreville vient d'un éphémère propriétaire au temps de Louis XIII; plus célèbre est Guillaume Cornuel, époux d'une des femmes les plus spirituelles du Marais. Le second corps d'hôtel, sur la rue des Francs-Bourgeois, a été reconstruit en 1767 pour Louis-Charles Le Mairat. La façade est déjà de style Louis XVI".

Cette mention de "Guillaume Cornuel, époux d'une femmes les plus spirituelles du Marais" m'a interpelé car on ne pouvait pas y lire le nom de l'épouse elle-même. Une recherche assez rapide m'a fait découvrir une personnalité, que je l'avoue, je ne connaissais pas : Madame Cornuel. 

Celle-ci, née sous le nom d'Anne-Marie Bigot, le 29 novembre 1605, était la fille de Jacques Bigot, intendant du duc de Guise et qui mourût le 8 mars 1626. Moins d'un an après la mort de son père le 7 février 1627, elle épousa à l'église Saint-Jean-en-Grève, Guillaume Cornuel, né vers 1578, et qui était "trésorier des parties casuelles et de l'extraordinaire des guerres" (une fonction financièrement très profitable). Guillaume Cornuel, avec son épouse, acheta l'hôtel de l'actuel 26, rue des Francs-Bourgeois en 1638. Il décéda le 28 octobre 1657, mais sa veuve, Madame Cornuel lui survécut plus de 35 ans. Elle mourût le 9 février 1694 à l'âge de 88 ans. Elle tint avec ses filles un salon qui eut une certaine notoriété et qui accueillit notamment Mme de Sévigné qui venait en voisine. Anne-Marie Bigot de Cornuel était très célèbre pour son don des réparties (et elle a été assez régulièrement citée par Madame de Sévigné dans ses lettres).

J'ai trouvé une page très complète à son sujet (même si elle comporte une erreur en ce qui concerne la date de la mort de son mari qui est mort en 1657, et pas en 1650). Une épitaphe rédigée juste après sa mort, en 1694,permet de comprendre la réputation qu'elle avait :

Ci-gît qui de femme n'eut rien
Que d'avoir donné la lumière
A quelques enfants, gens de bien,
Et peu ressemblants à leur mère,
Célimène, qui de ses jours,
Comme le sage, et sans faiblesse,
Acheva le paisible cours.
Dans ses mœurs, quelle politesse !
Quel tour, quelle délicatesse
Éclataient dans tous ses discours !"

Parmi les propos acerbes, voyant un monsieur pâle et décharné, elle aurait dit "Voici un monsieur qui a oublié de se faire enterrer".  Elle eut surtout cette phrase assez savoureuse "M. le duc de Rohan est bien né, mais il a été bien mal fouetté". 

Madame Cornuel (1605-1694)

Madame Cornuel tenait salon en l'hôtel du 26, rue des Francs Bourgeois, en compagnie de son amie Marguerite Le Gendre issue du 1er mariage, de la veuve de Guillaume Cornuel. Marguerite Le Gendre était la fille de Marguerite Combefort et d'un dénommée Le Gendre. Devenue veuve, Mme Le Gendre avait épousé Guillaume Cornuel, mais elle était elle-même décédée en 1626. Madame Cornuel avait donc un lien familial très éloigné avec Mademoiselle Legendre, née en 1600, mais elle la considérait comme sa belle-fille. Elles n'avaient que 15 ans de différences. Elle fut connue dans le "monde précieux" sous le nom de la reine Marguerite. Elle épousa en 1652 le gouverneur de Vincennes, Monsieur de la Ferronnays.

Quant à Madame Cornuel, Tallemant des Réaux lui consacra une de ses Historiettes. Voici des extraits ce qu'il dit de Mme Cornuel :

"Madame Cornuel était fille unique d'un M. Bigot, qu'on appelait Bigot de Guise, parce qu'il était intendant de feu M. de Guise. Cette fille avait été furieusement dorlotée. Le père, qui était riche, fit quelque méchante affaire; il fut tout glorieux de la donner à Cornuel, frère du président Cornuel, dont nous avons parlé. Cet homme en devint amoureux à l'enterrement de sa première femme, et l'épousa peu de temps après. C'était une jolie personne et fort éveillée. Il n'y avait pas longtemps qu'ils étaient ensemble quand elle s'avisa d'une plaisante folie. Un soir, qu'elle avait fait semblant d'aller dehors à une assemblée du voisinage, elle s'habille comme on représente les âmes qui reviennent, et sur le minuit va tirer les rideaux de ce pauvre homme, et lui fit des reproches de son ingratitude, et après elle se mit à rire comme une folle. 

 Elle a de l'esprit autant qu'on en peut avoir; elle dit les choses plaisamment et finement. Une fille de la première femme de son mari, qu'on appelle mademoiselle Le Gendre, et une fille de M. Cornuel et de cette première femme qu'on appelle encore aujourd'hui Margot Cornuel, ont aussi toutes deux bien de l'esprit, et de cet esprit un peu malin, qui est celui qui plaît le plus. Tout cela attirait bien du monde chez elle, car ces trois personnes étaient toutes trois jolies.

 Elle dit que les cornes sont comme les dents; elles font du mal à percer, et après on en rit. Ce fut elle qui donna le nom d'Importants aux gens de la cabale de M. de Beaufort, parce qu'ils disaient toujours qu'ils s'en allaient pour une affaire d'importance. Elle a dit depuis que les Jansénistes étaient des importants spirituels.")

 

 D'autres informations données à propos de cet Hôtel particulier ont attiré mon attention. J'en parlerai dans mon prochain article... 

vendredi 24 octobre 2025

MMDCCCXLII : Le nouveau banc circulaire de la rue Pavée

 

Lors d'une réunion publique du 8 novembre 2023, il avait été annoncé qu'un banc circulaire serait installé autour de l'arbre situé à la jonction entre la rue Pavée et la rue Malher (article du 28 décembre 2023). Je publie cet article (après celui du 14 avril 2025 consacré au pavage) pour dire à quel point je trouve réussi l'aménagement. Ce banc circulaire est vraiment superbe.



lundi 20 octobre 2025

MMDCCCXLI : Les statues du Louvre (32e volet) : Vauban par Gustave Crauk

 

Voici le 32e épisode de la série relative aux statues qui décorent la cour du Louvre. Il concerne la statue de Vauban l'on peut voir sur la rotonde de Beauvais  :

La statue de Vauban est la quatrième en partant de la gauche :

Sébastien Le Prestre de Vauban est né le 1er mai 1633 à Saint-Léger-de-Foucheret  (Yonne). Il a est surtout connu pour avoir été l'architecte des places fortes construites pour le roi Louis XIV afin de protéger les frontières. Il a aussi écrit des essais dont un fort intéressant dans lequel il prônait une audacieuse réforme fiscale 'la dîme royale" (1707). Vauban avait été élevé au rang de maréchal. C'est pourquoi il tient un baton ;


 Vauban est mort le 30 mars 1707, à quelques centaines de mètres de l'endroit où se trouve cette statue, rue de Rivoli, à l'angle avec le 1, rue Saint-Roch (voir article du 5 février 2022).

La statue est une oeuvre de Gustave Crauk, né à Valenciennes le 16 juillet 1827, et mort à Meudon, le 17 novembre 1905. On lui doit aussi la statue de Coligny au chevet de l'oratoire du Louvre (article du 3 mai 2021).

Le sculpteur a représenté Vauban avec un panier en osier renversé derrière lui. Je n'ai pas réussi à comprendre pourquoi. Peut-être afin de représenter un panier contenant les explosifs lancés lors des sièges menés par Vauban pour le roi Soleil.


 

 

mercredi 15 octobre 2025

MMDCCCXL : Les façades de Paris Centre : Au 61, rue Montorgueil, un immeuble avec un décor typique du style Rambuteau


 Au 61, rue Montorgueil, on trouve un immeuble typiquement de style Rambuteau. Mon attention a été attirée par le fait que mon propre immeuble qui date de 1831 comporte dans le hall exactement le même pavage dans le sol :

La façade comporte un autre élément typiquement de l'époque du préfet Rambuteau dans les années 1830/1840 : les petites rosaces décoratives :


On retrouve ce type de décor dans la corniche du hall, entre les consoles (elles-mêmes typiquement de style Rambuteau).



vendredi 10 octobre 2025

MMDCCCXXXIX : Les façaces de Paris centre : L'école du 42, rue Dussoubs. Une école inauguée en grande pompe en novembre 1911

  

En consultant le Bulletin municipal officiel de la Ville de Paris, dans son édition du 11 décembre 1911, j'ai découvert le compte-rendu sur plusieurs pages de l'inauguration d'une école de Paris Centre : celle du 42, rue Dussoubs. Pour l'événement, un grand nombre de personnages officiels étaient présents, comme on peut le lire au début du texte :


 La cérémonie était présidée par le ministre de l'instruction publique et des Beaux-Arts, Théodore Steeg, né le 19 décembre 1868 à Libourne et mort le 19 décembre 1950 à Paris, il était député du 14e arrondissement de Paris sous l'étiquette des radicaux-socialistes, élu lors d'une partielle en 1904, et réélu en 1906 et 1910. Il été ministre de l'Instruction publique et des Beaux-Arts du 2 mars 1911 au 14 janvier 1912. Il s'agissait de sa première présence dans un gouvernement mais il a par la suite obtenu de très nombreux portefeuilles ministériels et a été président du Conseil du 12 décembre 1930 au 22 janvier 1931. En juillet 1940, il a ait partie des sénateurs qui se sont abstenu lors du vote des pleins pouvoirs au Maréchal Pétain

Parmi les discours, celui du conseil municipal du quartier Bonne Nouvelle, M. Rebeillard* est intéressant car il mentionne et rend hommage à l'architecte de l'école, un dénommé M. Rous :

La façade, assez sobre, a énormément de charme avec de la brique très sobre mais de très belles polychromie et des volumes agréables avec les deux parties surélevées à gauche et à droite.

Un décor végétal très sobre montre un goût qui annonce le style Art Déco (loin des excès de l'exubérance du style Art Nouveau très en vogue la décennie précédente)  :

 Concernant l'architecte, j'ai trouvé très peu d'informations complémentaires. Il avait pour prénom Jean. Jean Roux a aussi été l'architecte d'Habitations à Bon Marché (HBM) construites par l'Assistance Publique en 1913 dans le 13e arrondissement (voir article du Monde paru le 15 septembre 2016 : "Au pays des HBM").

* Étienne Rebeillard (1860-1942) a été conseiller municipal représentant du quartier Bonne nouvelle de 1896 à 1900 et de 1904 à 1935. Il a été président du conseil général de la Seine de 1931 à 1932.


 

dimanche 5 octobre 2025

MMDCCCXXXVIII : Au 36, rue de Poitou, un thermomètre qui symbolise la réussite éphémère de celui qui a mis au point le pagoscope

 

Au 36, rue de Poitou (Paris 3e), on peut voir sur la façade un de ses nombreuses curiosités qui font le charmes de Paris : au 1er étage, entre les deux fenêtres, on peut voir un énorme thermomètre :

Je ne lui avais pas encore consacré d'articles car il a déjà fait l'objet de parutions sur de nombreux autres blogs de qualité :

- Des usines à Paris, article du 18 septembre 2012 : "Le thermomètre de la rue de Poitou" 

- Paris Bise Art, article du 5 décembre 2012 : "Le gros thermomètre de la rue du Poitou".

- Vivre le Maris, article du 21 juillet 2013 : "Le thermomètre géant de la rue de Poitou (IIIe) 

- Paris, maman et moi, artiche du 20 août 2013 : " le thermomètre géant de la rue du Poitou".


 Tous ces articles mentionnaient un personnage appelé Lucien Bernel-Bourette qui a mis au point le pagoscope, un thermomètre permettant de savoir s'il allait geler dans la nuit. Voici une définition dans un Larousse Universel en deux volumes de 1922 :

Voici un prospectus de 1913 qui permet de savoir à quoi ressemblait le pagoscope :

On peut trouver sur Internet des pagoscopes en vente comme objet de curiosité, ce qui permet de voir les couleurs vives de cet instrument :


 Je me suis demandé dans un premier temps comment un tel commerce avait pu se développer dans un si petit immeuble puis et surtout ce que l'on pouvait savoir sur ce Lucien Bernel-Bourette, dont aucun article ne mentionnait la date de naissance ou de mort.

J'ai d'abord utilisé une source pour vérifier le type d'entreprise qui se trouvait au 36, rue de Poutou. J'ai consulté l'almanach Paris-Hachette de 1904 faisant la liste de toutes les entreprises de Paris de Paris. Bernel-Bourette y est mentionné en tant que commerçant d'optique :

Complètement par hasard, j'ai aussi découvert un journal indien édité à Calcutta, l'Amrita Bazar Patrika paru le 16 mars 1905. Dans un article concernant les progrès scientifiques, le pagoscope est mentionné et décrit. Il donne l'adresse du 36, rue de Poitou :

Une découverte mentionné jusqu'en Inde... je me suis dit que Lucien Bernel-Bourette avait dû avoir une certaine notoriété. J'ai été très surpris en me rendant compte que très peu (voire pas du tout) d'informations étaient données le concernant. 

Grâce à l'aide de @Sfefdesvosges, j'ai pu retrouvé un premier document intéressant. L'acte de mariage de Lucien Bernel et d'Adeline Bourette célébré le 14 juin 1900 à la mairie du 3e arrondissement :

On y apprend

1. Que Lucien Bernel était né à Nancy, le 12 décembre 1872. Il avait donc 27 ans au moment de son mariage en 1900.

2 Qu'au moment de son mariage, il est décrit comme "représentant de commerce".

3. Qu'il habitait au 4, passage Saint-Pierre Amelot. On apprend plus loin dans l'acte qu'il s'agit aussi de l'adresse de son frère plus âgé que lui, Charles Bernel qui était "fabricant de meubles".

4. Que le 36, rue de Poitou était l'adresse des parents d'Adeline Bourette (on en déduit donc que Lucien Bernel s'est installé avec son épouse au domicile de ses beaux-parents).

5. Que le père d'Adeline Bourette, Henri François Louis Bourette (qui donc habitait 36, rue de Poitou) était fondeur.

Les registres d'état civil du 3e arrondissement montrent que les époux Bernel-Bourette ont, au moins, eu deux enfants. Il est intéressant de voir les changements dans la profession indiquée pour le père.

- L'aîné, Lucie Marie Anna Bernel est née le 9 avril 1901. Lucien Bernel y est toujours décrit en tant que "représentant de commerce". Son beau-père Henri Bourette qui est mentionné comme témoin habite toujours au 36, rue de Poitou et il est toujours "fondeur" :

- Un frère, Henri Charles Georges Bernel, est né trois ans plus tard, le 9 juin 1904. Le père est désormais mentionné comme "industriel". Son beau-père a pris sa retraite. Il est devenu rentier et il habite à Villiers-le-Bel. Le frère de Lucien Bernel, Charles est lui aussi mentionné en tant qu'"industriel". Il semble donc que l'ensemble de la famille ait progressé dans la hiérarchie sociale :

Comme indiqué sur le site "des usines à Paris", l'entreprise Bernel-Bourette a déménagé au 84, boulevard Beaumarchais, avec un accès par le 73, rue Amelot. Lucien Bernel a ainsi pu développer son activité grâce à la mise au point du pagoscope.

Un hôtel, avec un revendeur de vin, s'est installé au 36, rue de Poitou. Il est mentionné sur l'almanach Paris-Hacette de 1913 :


 L'entreprise Bernel-Bourette est indiquée au 84, boulevard Beaumarchais avec comme activité la production de "plaques en relief et thermomètres" :

 

Cependant, si Lucien Bernel-Bourette semble avoir gagné en aisance sociale, il en a profité très peu. @Stefdesvosges a retrouvé son acte de décès. Il est mort à Villejuif le 29 mars 1916. Il y est décrit désormais comme un commerçant :

Lucien Bernel-Bourette est donc décédé à l'âge de 43 ans. Son ascension sociale s'est ainsi arrêtée brutalement et cela explique, peut-être, pourquoi il est difficile de trouver des informations sur lui.

Reste son nom et celui de son épouse en haut du thermomètre du 36, rue de Poitou :


mardi 30 septembre 2025

MMDCCCXXXVII : Une peinture qui permet de voir un édifice oublié : le pavillon de la duchesse de Maine à l'Arsenal


 Au musée des Beaux-Arts de Tours, mon attention a été retenue par ce tableau de Jean-Pierre-Louis-Laurent Houël (1735-1813) car il a pour titre Vue de la Seine devant les jardins de l'Arsenal à Paris. Il a été peint en 1769.

En reprenant un plan Turgot des années 1730, j'ai retrouve un élément du tableau qui permet de bien le situer dans le Paris du XVIIIe siècle. Un endroit appelé sur le plan "La pointe de l'Arsenal" :


On retrouve le bâtiment qui apparaît sur le plan dans le tableau et il est représenté de manière très semblable :

Le catalogue raisonné des peintures du XVIIIe siècle du musée des Beaux-Arts de Tours rédigé par Sophie-Joint Lambert et paru en 2008 nous apprend que cette construction avait été édifiée en 1729 pour la duchesse du Maine par l'architecte Boffrand.

Ce pavillon a été représenté, en 1741, par Charles Germain de Saint-Aubin :

La duchesse du Maine était une femme très puissante au XVIIIe siècle : Louise-Bénédicte de Bourbon, née le 8 novembre 1676 et décédée le 23 janvier 1753 était la fille d'Henri-Jules de Bourbon-Condé donc membre d'une branche cadette de la dynastie des Bourbons. Elle était surtout l'épouse du duc de Maine, Louis-Auguste de Bourbon (1670-1736), fils bâtard légitimé du roi Louis XIV. En 1719, lors de la conspiration de Cellamare, il complota contre son cousin le régent Philippe d'Orléans ce qui lui valu d'être emprisonné tout comme son épouse (qui l'avait fortement incité à s'impliquer dans cette intrigue). 

L'Arsenal était une des résidences du duc de Maine car il avait été nommé en septembre 1694 Grand maître de l'Artillerie. Le pavillon de la duchesse de Maine n'était qu'un petit édifice par rapport au reste des bâtiments :

 Dans un article écrit en 1970 dans Bulletin Monmental, Jean-Pierre Babelon a publié des plans du pavillon de la duchesse de Maine. Il était composé par un vaste salon donnant face à la Seine :

La façade à pans coupés de ce salon faisait face à la Seine avec une terrasse en bord du fleuve.


 La partie que l'on peut voir sur la peinture de Houël exposée au musée des Beaux-Arts de Tours est la façade Est qui devait avoir une très belle vue puisqu'elle donnait vers Paris.

 

En 1769, ce pavillon de la duchesse de Maine, passé aux mains du duc de Choiseul fut transformé en maison de bain. Situé en amont de la Seine, par rapport à Paris, il permettait d'y profiter d'une eau plus pure qu'en aval. Cela explique que l'oeuvre ait fat partie des collections du château de Chanteloup (où Choiseul avait dû d'exiler après sa disgrace) qui ont fait l’objet d'une saisie révolutionnaire en 1794.

 Au 1er plan du tableau, on peut voir le bord de Seine :

Il s'agit du bras de Seine vue depuis la pointe de l'île Louvier (ou des Louviers) [rattachée à la rive droite en 1843] ou depuis l'estacade qui reliait cette île à la rive droite :

Une partie du paysage semble relever de l'imagination de l'artiste. Par exemple sur la gauche, on voit un clocher avec une flèche :


A cet endroit, on devrait trouver l'hôpital de la Salpétrière comme on le voit sur plan Turgot :

Ce n'est pas une flèche que l'on devrait voir mais une coupole :

Autre élément qui semble relever de l'imagination : la sinuosité du bord de Seine sur la rive droite en amont du pavillon de la Duchesse de Maine :


Aucun plan d'époque ne montre une telle irrégularité de la Seine comme par exemple sur le plan Jaillot révisé en 1770 (un an après l'année où Houël a peint ce tableau) :
Le tableau de Houël est donc très intéressant pour ce qui concerne l'aspect du Pavillon de la duchesse de Maine mais me semble un peu plus approximatif concernant le reste du paysage et relève des qualités créatives de l'artiste.