samedi 18 février 2023

MMDXXXIX : Les rues de Paris Centre : La rue du Pélican, une rue très ancienne dont le nom à une origine graveleuse

 

La rue du pélican est une rue que je fréquente depuis très longtemps car je fréquente assez souvent deux établissements de restauration situés à son extrémité Ouest. 

 


Je ne m'étais jamais interrogé sur l'origine du nom de cette petite rue. En effet, celle-ci située entre le 8 rue Croix-des-Petits-Champs (à l'Ouest) au 11 de la rue Jean-Jacques Rousseau (à l'Est) : elle ne fait que 62m de long.

La lecture de l'article que lui consacre le Dictionnaire administratif et historique de Paris de 1844 a retenu mon attention pour deux raisons.

1°) L'article permet de se rendre compte que cette rue a une origine très ancienne. Elle a été constuite hors de l'enceinte de Philippe Auguste de la fin du (XIIe siècle) :

La rue était ainsi une petite ruelle située en parallèle juste au nord de la voie qui menait à la porte Saint-Honoré comme on peut le voir sur cette carte qui reconstitue l'emplacement de l'enceinte de Philippe Auguste :


Elle était déjà lotie en 1305 au début du XIVe siècle mais ce n'est qu'avec l'enceinte de Charles V construite à la fin de ce même siècle qu'elle a été protégée par les remparts de Paris. Cette rue dès son origine faisait la longueur qu'elle a aujourd'hui. On peut la voir sur le plan  dit de Bâle du milieu du XVIe siècle même si son nom n'apparaît pas :

Elle figure -avec son nom- sur le plan Turgot des années 1730 :

Je connais très peu de rues de Paris qui ont gardé le même emplacement et  la même longueur depuis le Moyen âge. Elle a conservé la plaque son ancienne plaque gravée sur décision du lieutenant général de police Herault en 1728 :

2°) Je pensais que la rue du Pélican faisait référence à un pélican. En effet, dans le bestiaire médiéval cet animal joue un rôle important car au Moyen Âge, on croyait que cet animal avait l'habitude de se percer le cœur de son bec pour nourrir sa progéniture et il était un symbole christique. Or en lisant l'article du Dictionnaire historique, je me suis rendu compte que je m'étais trompé :

Derrière la formule "une dénomination trop indécente pour être rappelée ici", j'ai appris sans trop cherche qu'il s'agissait initialement de la rue "du poil au con", évocation semble-t-il de la pilosité des prostituées qui étaient installées dans cette rue. Elle rejoint donc la liste des voies de Paris centre qui ont une origine coquine : la rue du Petit-Musc (voir article du 19 mai 2008) et l'ancien nom de la rue Marie Stuart (article du 26 octobre 2019).

La rue a semble-t-il provisoirement changé de nom à la toute fin du XVIIIe siècle :

Cependant, sur tous les plans de la fin du XVIIIe siècle que j'ai consultés, elle garde toujours le nom de rue du Pélican comme celui-ci de 1796 :

et celui-ci de 1801/1802 :

Peut-être que l'administration ne s'est jamais résolue à mettre en application le changement du nom de cette rue qui finalement était assez anodin. Quoi qu'il en soit, depuis 1806, elle a officiellement repris son nom de rue du Pélican comme on peut le voir sur ce plan de 1808 :

Cette rue a cependant changé en ce qui concerne sa largeur car à deux reprises l'administration a été soucieuse de l'élargir. Une première fois sous le Consulat avec une décision du 13 fructidor an VIII (31 août 1800) et une deuxième fois le 22 novembre 1832 :

Cette petite ruelle étroite de 62m de long à quelques centaines de mètres du pouvoir central (Napoléon Bonaparte en 1800, tout comme Louis-Philippe en 1832 résidaient aux Tuileries) était ainsi l'objet de l'attention des pouvoirs publics.

En ce qui concerne l'élargissement, on se rend compte que les alignements prévus n'ont pas été respectés mis à part dans la partie centrale qui est tellement plus large que les deux extrémités qu'elle semble former une petite placette :


 La partie située en retrait côté sud (impair) est la plus en retrait :

On voit sur le plan cadastral du début du XIXe siècle qu'elle a été construite après avoir fait disparaître une très grande demeure qui donnait sur la rue Jean-Jacques Rousseau et dont une partie des dépendances, dont les écuries jouxtaient la rue du Pélican.

Il n'en reste plus rien aujourd'hui...

Par contre, j'ai discuté avec une riveraine de la rue en préparant cet article. Elle m'a raconté que dans les années 1960 il y avait encore des femmes qui exerçaient dans cette rue l'activité qui est à l'origine du nom de la rue .

La rue du Pélican a connu dernièrement une nouvelle transformation. Depuis l'été 2022, la rue du Pélican est devenue piétonne... mais par contre les péripatéticiennes qui y exerçaient ont complètement disparu. 

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